PRINCESSE LOUISE DE BELGIQUE

Autour des trônesque j'ai vu tomber

«Die That ist überallentscheidend.»

Gœthe.

ALBIN MICHEL, EDITEUR
PARIS, 22, RUE HUYGHENS, 22, PARIS

Il a été tiré de cet ouvrage:

10 exemplaires sur papier vergé pur fildes Papeteries Lafumanumérotés à la pressede 1 à 10

Droits de traduction et reproduction réservés pour tous pays.
Copyright 1921 by Albin Michel.

Je dédie ces pages au grand homme,au grand Roi, que fut mon père.

Autour des Trônes que j'ai vu tomber

I

POURQUOI J'ÉCRIS CECI

Fille aînée d'un grand homme et grand roi, dontla magnifique intelligence a enrichi son peuple, jen'ai dû que des infortunes à mon origine royale. Apeine entrée dans la vie, j'ai été déçue et j'ai souffert.Je l'imaginais trop belle.

Au soir de mes rêves, je ne veux pas rester sousle faux jour où je suis placée.

Sans désirer m'étendre sur le passé, et refaire lechemin du calvaire que j'ai gravi, je veux, dumoins, puiser dans mes souvenirs et mes réflexionsquelques pages, inspirées aussi des événements quiont renversé les trônes près desquels j'ai vécu. L'empereurd'Autriche, l'empereur d'Allemagne, le tzarde Bulgarie furent pour moi des figures familières.

Amenée par la guerre à Munich, puis à Budapesth,prisonnière, un moment, des bolchevistes hongrois,j'ai vécu la tourmente européenne, en voyantfrappé et puni tout ce qui m'avait méconnue etaccablée.

Et je tremblais, chaque jour, pour ma chère Belgique,si grande par le courage et le travail, et injustepour moi. Oh! non le peuple, ce bon peuple,si naturellement infatigable et héroïque, mais certainsde ses dirigeants, abusés sur mon compte.

Ne revenons pas, toutefois, sur les choses accomplies.Ma pensée demeure fidèlement et affectueusementattachée à ma terre natale, pour l'aimer etpour l'honorer.

C'est d'elle que je veux parler, avant d'évoquerles cours de Vienne, de Berlin, de Munich, de Sofia,et tant de faits que ces noms me rappellent etdont certains méritent d'être mieux connus etmédités.

Je n'ai jamais eu pour la Belgique que les sentimentsd'une impérissable affection. Au plus péniblede mes épreuves, pendant l'horrible guerre, je songeaisqu'elle était encore plus à plaindre que moi.

Le jour où, perquisitionnée par les bolchevisteshongrois, à Budapesth, j'ai entendu un de ceshommes dire, après avoir vérifié à quelle simplicitéje me trouvais réduite: «Voilà une fille de roiencore plus pauvre que moi!» j'ai pensé aux malheureusesd'Ypres, de Dixmude, puis aux malheureusesde France, de Pologne, de Roumanie, deSerbie et d'ailleurs, infortunées créatures sans foyeret sans pain, par le crime de la guerre, et j'ai pleurésur elles, et non sur moi.

Plus d'une, peut-être, avant 1914, enviait monsort: j'aurais préféré le sien!

Mariée à dix-sept ans, je croyais trouver dans lemariage les joies que peuvent donner un mari et desenfants. J'y ai trouvé les pires épreuves.

La rupture était inévitable entre mes sentimentsintimes et ce qui m'environnait. Je portais en moitrop d'indépendance pour dépendre de ce qui m'offensait.

Les honneurs sont souvent sans honneur au plushaut de ce qu'ils semblent. Sauf de rares exceptions,la fortune et le pouvoir développent en nousl'appétit du plaisir et poussent aux dépravations.Ceux que La Bruyère appelle les Grands perdentfacilement l

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