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J. Vilbort

EN KABYLIEVOYAGE D'UNE PARISIENNE AU DJURJURA

ParisCharpentier et Cie, Libraires-Éditeurs28, quai du Louvre

1875

CHAPITRE PREMIER
D'ALGER AU FORT NATIONAL.

Nos amis d'Alger nous disaient: Aller en Kabylie et au Désert! ypensez-vous? Le Sud est en fermentation. Les marabouts fanatiquesannoncent partout l'arrivée du Moule-Saâ [Le maître de l'heure.], qui,venant de l'Ouest, du Maroc, du Gharb, du Mogreb-el-Aksa, doit, avec sonyatagan, couper la tête à tous les Roumis [Chrétiens.]. Réfléchissezque nous sortons du Rhamadhan [Le feu qui purifie.], et qu'à ce jeûnerigoureux du neuvième mois s'ajoutent les excitations du printemps pouragiter les ferments de haine et de révolte que tout Arabe ou tout Kabylepuise dans le lait de sa mère. Restez donc parmi nous, à Alger la biengardée, qui, en avril, n'est que parfum et lumière. Où trouverez-vous unciel plus pur, un air plus doux? N'allez pas vous jeter dans uncoupe-gorge.

Mais à ces exhortations de l'amitié prudente, le Général ne répondaitque par un dédaigneux sourire. Comment, faible femme, supporteriez-vousles fatigues d'un pareil voyage? Ignorez-vous que jamais un phaéton, nimême le plus méchant des voiturins, n'a pu gravir les pentes kabyles?Quelques chevaux ont tenté l'escalade, mais presque tous s'y sont casséles reins. La route est bonne jusqu'à Tizi-Ouzou, et les cochers d'Algervous y mèneront. De Tizi-Ouzou au fort National, il y a un chemintrès-pittoresque, dit-on, que l'armée du maréchal Randon tailla, en1857, dans les flancs de la montagne; mais vous ne pourrez vous yaventurer qu'avec huit ou dix mulets du train. Vous courrez le risque devous noyer dans le Sébaou, grossi par les torrents d'hiver et qu'il fautpasser à gué. Après cela, rien que des escarpements abruptes, desprécipices effroyables, où les plus fortes têtes gagnent le vertige, etque les mulets eux-mêmes hésitent à franchir quand il pleut, car ilsuffit d'une glissade pour s'aller briser en morceaux au fond d'un abîmede mille mètres.

Et ce n'est pas le pire danger, Madame: à peine aurez-vous mis le piedsur la terre berbère, que vous serez assiégée par une légion affamée etfurieuse, acharnée à défendre l'indépendance nationale. Vous aurez beauinvoquer l'autorité française et l'hospitalité kabyle, rien ne vouspréservera des insultes ni des blessures de la puce musulmane. Et s'iln'y avait qu'elle seule à combattre! Mais il est un être immonde dont leKabyle comme l'Arabe a fait son plus intime ami. Il l'héberge dans sagandoura [Chemise de laine.]; il le nourrit de sa chair et l'abreuvede son sang. Quand cet hôte parasite se rend par trop importun, il leprend entre le pouce et l'index pour le déposer à terre, délicatement etcomme à regret. L'odieux compagnon de voyage! Il est encore d'autrespérils. Et d'abord, votre teint se gardera-t-il du hâle?

Et Sidi-Yzem [Le seigneur lion.], Madame! Si tout à coup il se dressaitdevant vous, hérissant sa terrible crinière, dardant sur vous sesprunelles de feu, voudriez-vous, à la manière des femmes kabyles,désarmer sa colère en lui disant:

«O Sidi, toi qui es si fort, si puissant, qui fais trembler les hommes,à qui rien ne résiste, tu es trop généreux pour faire la moindre peine àune pauvre femme qui t'admire et qui ferait tout pour te plaire; car jene suis qu'une femme, moi! regarde…»

Vous voyez-vous assaillie sur un thamgouth [Pic.] du Djurjura par unouragan de neige? retenue prisonnière par un déluge dans une écuriekabyle? ou bien, j'en frémis pour vous, enlevée par un montagnar

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