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LES
BELLES-DE-NUIT.
IMPRIMERIE DE G. STAPLEAUX.
OU
LES ANGES DE LA FAMILLE
PAR
Paul Féval.
BRUXELLES.
MELINE, CANS ET Cie, LIBRAIRES-ÉDITEURS.
LIVOURNE. | LEIPZIG. |
1850
La partie grave et discrète de l'assemblée,qui se respectait trop pour prendre part à ladanse, commençait à trouver le bal monotoneet long. Les commérages languissaient, parcequ'on avait déjà médit de tout le monde. L'évanouissementde Blanche fit à l'ennui naissantune diversion tout agréable et vint raviver l'entretien.
Ce cercle respectable se composait de troisvicomtes, qui avaient été des hommes à succès2dans leur jeunesse au temps des états de Bretagne,d'une demi-douzaine de bourgeois qu'onavait laissés se décrasser et mettre un de au-devantde leurs noms, parce qu'ils avaient milleécus de rente, et d'un nombre à peu près égalde dames antiques, portant, avec une solennitéimpossible à décrire, le ridicule orgueilleux deleur toilette et la laideur choisie de leurs visages.
On remarquait surtout trois petites personnes,toutes trois également jaunes, sèches, roides etvêtues de robes de soie violette d'une anciennetéincontestable. Bien qu'elles fussent encore célibataires,aux environs de la cinquantaine, cequi déprécie, elles donnaient le ton à la société,parce que leur talent de médire était hors ligne,et que chacun de leurs coups de langue emportaitnet le morceau. Leurs rivales elles-mêmes,madame la chevalière de Kerbichel, épouse del'adjoint au maire de Glénac, et madame ClaireLebinihic, jeune veuve à peine âgée de quarante-cinqans, autour de laquelle soupiraient lestrois vicomtes, étaient forcées de reconnaître lasupériorité des demoiselles Baboin-des-Roseaux-de-l'Étang.
Il faut dire qu'elles avaient tout pour elles.L'aînée, mademoiselle Amarante, chantait, ens'accompagnant de la guitare, l'ariette légère; laseconde, mademoiselle Églantine, la tremblante