LE
DIABLE BOITEUX

PAR LE SAGE

SUIVI DE L'ENTRETIEN DES CHEMINÉES DE MADRID
ET D'UNE JOURNÉE DES PARQUES

PAR LE MÊME AUTEUR

ET PRÉCÉDÉ D'UNE NOTICE
PAR M. PIERRE JANNET

TOME II

PARIS
ALPHONSE LEMERRE, ÉDITEUR
27, PASSAGE CHOISEUL, 27

M DCCC LXXVI

Tous droits réservés.

E. PICARD.

IMP. EUGÈNE HEUTTE ET Ce, A SAINT-GERMAIN.

LE
DIABLE BOITEUX

CHAPITRE XIII
La force de l'amitié.

HISTOIRE.

Un jeune cavalier de Tolède, suivi de sonvalet de chambre, s'éloignait à grandesjournées du lieu de sa naissance, pour éviterles suites d'une tragique aventure. Il étaità deux petites lieues de la ville de Valence,lorsqu'à l'entrée d'un bois il rencontra unedame qui descendait d'un carrosse avec précipitation:aucun voile ne couvrait son visage,qui était d'une éclatante beauté, et cettecharmante personne paraissait si troublée,que le cavalier, jugeant qu'elle avait besoinde secours, ne manqua pas de lui offrir celuide sa valeur.

«Généreux inconnu, lui dit la dame, jene refuserai point l'offre que vous mefaites: il semble que le ciel vous ait envoyéici pour détourner le malheur queje crains. Deux cavaliers se sont donnérendez-vous dans ce bois; je viens de lesy voir entrer tout à l'heure; ils vont sebattre; suivez-moi, s'il vous plaît: venezm'aider à les séparer.» En achevant cesmots, elle s'avança dans le bois, et le Tolédan,après avoir laissé son cheval à sonvalet, se hâta de la joindre.

«A peine eurent-ils fait cent pas, qu'ilsentendirent un bruit d'épées, et bientôt ilsdécouvrirent entre les arbres deux hommesqui se battaient avec fureur. Le Tolédancourut à eux pour les séparer, et, en étantvenu à bout par ses prières et par sesefforts, il leur demanda le sujet de leurdifférend.

«Brave inconnu, lui dit un des deuxcavaliers, je m'appelle don Fadrique deMendoce, et mon ennemi se nomme donAlvaro Ponce. Nous aimons dona Théodora,cette dame que vous accompagnez;elle a toujours fait peu d'attention à nossoins, et quelques galanteries que nousayons pu imaginer pour lui plaire, lacruelle ne nous en a pas mieux traités.Pour moi, j'avais dessein de continuer àla servir malgré son indifférence; maismon rival, au lieu de prendre le mêmeparti, s'est avisé de me faire un appel.

«—Il est vrai, interrompit don Alvar,que j'ai jugé à propos d'en user ainsi: jecrois que si je n'avais point de rival, donaThéodora pourrait m'écouter: je veuxdonc tâcher d'ôter la vie à don Fadrique,pour me défaire d'un homme qui s'opposeà mon bonheur.

«—Seigneurs cavaliers, dit alors le Tolédan,je n'approuve point votre combat; iloffense dona Théodora: on saura bientôtdans le royaume de Valence que vous vousserez battus pour elle: l'honneur de votredame vous doit être plus cher que votrerepos et que vos vies. D'ailleurs, quelfruit le vainqueur peut-il attendre de savictoire? Après avoir exposé la réputationde sa maîtresse, pense-t-il qu'elle le verrad'un œil plus favorable? Quel aveuglement!Croyez-moi, faites plutôt sur vous,l'un et l'autre, un effort plus digne desnoms que vous portez: rendez-vous maîtresde vos transports furieux, et, par unserment inviolable, engagez-vous tousdeux à souscrire à l'

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