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UNE SAISON EN ENFER

ARTUR RIMBAUD

Prix: Un Franc

BRUXELLES
ALLIANCE TYPOGRAPHIQUE (M.-J. POOT ET COMPAGNIE)
37, rue aux Choux, 37
1873

Table


* * * * *

«Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festinoù s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient.

Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux.—Et je l'aitrouvée amère.—Et je l'ai injuriée.

Je me suis armé contre la justice.

Je me suis enfui. Ô sorcières, ô misère, ô haine, c'est àvous que mon trésor a été confié!

Je parvins à faire s'évanouir dans mon esprit toutel'espérance humaine. Sur toute joie pour l'étrangler j'aifait le bond sourd de la bête féroce.

J'ai appelé les bourreaux pour, en périssant, mordre lacrosse de leurs fusils. J'ai appelé les fléaux, pour m'étoufferavec le sable, le sang. Le malheur a été mon dieu. Jeme suis allongé dans la boue. Je me suis séché à l'air ducrime. Et j'ai joué de bons tours à la folie.

Et le printemps m'a apporté l'affreux rire de l'idiot.

Or, tout dernièrement m'étant trouvé sur le point de fairele dernier couac! j'ai songé à rechercher le clef du festinancien, où je reprendrais peut-être appétit.

La charité est cette clef.—Cette inspiration prouve quej'ai rêvé!

«Tu resteras hyène, etc...,» se récrie le démon qui mecouronna de si aimables pavots. «Gagne la mort avec toustes appétits, et ton égoïsme et tous les péchés capitaux.»

Ah! j'en ai trop pris:—Mais, cher Satan, je vous enconjure, une prunelle moins irritée! et en attendant lesquelques petites lâchetés en retard, vous qui aimez dansl'écrivain l'absence des facultés descriptives ou instructives,je vous détache ces quelques hideux feuillets de mon carnetde damné.


MAUVAIS SANG

J'ai de mes ancêtres gaulois l'œil bleu blanc, la cervelleétroite, et la maladresse dans la lutte. Je trouve mon habillementaussi barbare que le leur. Mais je ne beurre pas machevelure.

Les Gaulois étaient les écorcheurs de bêtes, les brûleursd'herbes les plus ineptes de leur temps.

D'eux, j'ai: l'idolâtrie et l'amour du sacrilège;—oh!tous les vices, colère, luxure,—magnifique, la luxure;—surtoutmensonge et paresse.

J'ai horreur de tous les métiers. Maîtres et ouvriers,tous paysans, ignobles. La main à plume vaut la main àcharrue.—Quel siècle à mains!—Je n'aurai jamais mamain. Après, la domesticité même trop loin. L'honnêtetéde la mendicité me navre. Les criminels dégoûtent commedes châtrés: moi, je suis intact, et ça m'est égal.

Mais! qui a fait ma langue perfide tellement, qu'elle aitguidé et sauvegardé jusqu'ici ma paresse? Sans me servirpour vivre même de mon corps, et plus oisif que le crapaud,j'ai vécu partout. Pas une famille d'Europe que jene connaisse.—J'entends des familles comme la mienne,qui tiennent tout de la déclaration des Droits de l'Homme.—J'aiconnu chaque fils de famille!


Si j'avais des antécédents à un point quelconque del'histoire de France!

Mais non, rien.

Il m'est bien évident que j'ai toujours été race inférieure.Je ne puis comprendre la révolte. Ma race ne se soulevajamais que pour piller: tels les loups à la bête qu'ils n'ontpas tuée.

Je me rappelle l'histoire de la France fille aînée del'Église. J'aurais fait, manant, le voyage de terre sainte; j'aidans la tête des routes dans les plaines souabes, des vuesde Byzance, des remparts de Solyme; le culte de Marie,l'attendrissement sur le cruc

...

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